2020, sujet zéro n° 2
par
Le candidat traite les deux parties du sujet : la dissertation et l’étude critique de documents.
Dissertation
Les sociétés humaines face aux fluctuations du climat, hier et aujourd’hui.
Étude critique de document – Le modèle westphalien, ses caractéristiques et sa pertinence
En analysant le document et en vous appuyant sur vos connaissances, répondez à la question suivante : le « modèle westphalien » permet-il de comprendre les relations internationales d’aujourd’hui ?
Si la paix de Westphalie a marqué un tournant dans l’histoire des nations, c’est parce que les éléments qu’elle a mis en place étaient aussi simples que radicaux. L’État – et non l’empire, la dynastie ou la confession religieuse – s’affirma comme l’élément fondamental de l’ordre européen. La notion de souveraineté étatique fut établie. Le droit de chacun des signataires de choisir sa propre structure intérieure et son orientation religieuse personnelle indépendamment de toute intervention fut reconnu, tandis que des clauses absolument nouvelles veillaient à ce que des confessions minoritaires puissent pratiquer leur foi en paix, sans risquer la conversion forcée. Au-delà des exigences immédiates de l’heure, les principes d’un système de « relations internationales » se mettaient en place, nourris par le désir commun d’éviter la réapparition d’une guerre totale sur le continent. On institua des échanges diplomatiques, notamment par l’installation de représentants permanents dans les capitales des autres États […]. Les parties voyaient dans l’organisation future de conférences et de consultations la création de tribunes qui permettraient de régler les querelles avant qu’elles n’entraînent des conflits armés. Le droit international élaboré pendant la guerre par des conseillers lettrés et voyageurs tels que Hugo de Groot (Grotius) apparut comme un ensemble extensible de règles admises par tous, destinées à cultiver l’harmonie, centrées autour des traités de Westphalie eux-mêmes.
Le génie de ce système, et la raison pour laquelle il s’est répandu à travers le monde, était que ses dispositions portaient sur des points de procédure, et non de fond. Si un État acceptait ces conditions de base, il pouvait être reconnu comme un citoyen international en mesure de préserver sa culture, sa politique, sa religion et sa politique intérieure personnelles, à l’abri de tout intervention extérieure du système international. […] Le concept westphalien prenait la multiplicité comme point de départ et intégrait des sociétés diverses, dont chacune était acceptée comme une réalité, dans une quête d’ordre commune. Au milieu du XXe siècle, ce système international était en vigueur sur tous les continents ; il constitue toujours la charpente de l’ordre international actuel.
Henry Kissinger, L’Ordre du monde, édition originale 2014, traduction française Paris, Fayard, 2016.