2022, sujet J1 pour les centres étrangers (g. 1)

épreuve du 11 mai 2022 (centres étrangers du groupe 1 : Afrique, Europe & Moyen-Orient)
mercredi 11 mai 2022
par  Julien Daget

22-HGGSP-J1-G11
sujet J1 pour l’Afrique, l’Europe et le Moyen-Orient (11 mai 2022)

Le candidat traitera un sujet de dissertation, au choix parmi les sujets 1 et 2. Il précisera sur la copie le numéro du sujet choisi pour la dissertation.


Sujet de dissertation 1
Réparer les sociétés après un génocide : moyens et enjeux.


Sujet de dissertation 2
Les enjeux de la question climatique.


Étude critique de documents – Les représentations et les défis de la guerre.
En analysant les documents, en les confrontant et en vous appuyant sur vos connaissances, montrez comment la nature des conflits, leurs représentations et les défis qu’ils posent aux États ont évolué.

Document 1
Le tableau « Napoléon Ier à la bataille de Wagram, 6 juillet 1809 » est une commande de Louis-Philippe au peintre Horace Vernet pour le Musée historique qu’il fonde à Versailles en 1837.

Horace Vernet, Napoléon Ier à la bataille de Wagram, 6 juillet 1809, 1836.

Document 2

Même s’il frappe indistinctement tous les régimes, le terrorisme global porte néanmoins aux démocraties un préjudice particulier en raison du lien entre le pouvoir et le peuple qui fonde ces régimes. Alors que dans le terrorisme territorialisé, l’attentat vise à faire plier le pouvoir en frappant le peuple, dans le terrorisme déterritorialisé, l’attentat vise plutôt à faire plier le peuple pour qu’il renonce lui-même à ses libertés et qu’il se précipite dans les bras du pouvoir. [...] Le terrorisme déstabilise profondément les fragiles équilibres de la relation démocratique entre le peuple et le pouvoir. Il réveille des fantasmes de part et d’autre : un désir de protection absolue de la part du peuple, l’occasion d’une nouvelle emprise sur le peuple par le pouvoir. [...]

Le discours politique emploie la métaphore de la guerre mais sans véritablement la prendre au sérieux, ce qui l’expose à faire une piètre politique et une mauvaise sécurité. Mauvaise stratégie, car il ne comprend pas que le but de cette nouvelle forme de terrorisme n’est pas de conquérir positivement un territoire mais de le contrôler négativement en rendant à ses habitants la vie impossible, en transformant tout divertissement en moment spécialement anxiogène, en menaçant physiquement les participants du débat public et en grignotant peu à peu ces moments d’insouciance qui font le charme de la vie en société. D’un point de vue stratégique, le premier objectif est de maîtriser les règles d’engagement et de contraindre l’adversaire à se battre sur son terrain avec des armes que l’on a choisies. Le tout sécuritaire n’accorde-t-il pas aux terroristes cette première manche ?

La seconde règle d’or de l’art militaire est de bien identifier ce que Clausewitz appelait le « centre de gravité » des forces de l’ennemi, celui autour duquel tourne tout le reste de sa puissance. Dans le cas du terrorisme global, ce centre de gravité n’est pas le soutien financier [...], ni la clandestinité, ni la structuration de l’organisation terroriste qui ne sont que des avantages, certes importants mais pas déterminants. Le centre de gravité des combattants du djihad, c’est leur détermination à se battre, elle-même due à la grandeur de la cause embrassée et à la force de la camaraderie en leurs rangs. Les pays démocratiques sont à l’inverse handicapés par l’extrême inverse : la peur de la mort, la couardise et l’individualisme qui affaiblit le lien social. Cette volonté de se battre est insensible à la pression sociale, à l’attrait du bien-être, ni bien sûr à la menace qui est à l’inverse une marque de reconnaissance. [...]

Le terrorisme oblige les démocraties à surmonter une épreuve nouvelle en ce qu’elle recouvre à la fois une agression externe mais aussi une crise interne. Il les surprend à un moment où elles sont guettées par une sorte de fatigue. Les sociétés démocratiques craignent que leur ouverture et leur diversité ne les affaiblissent en les exposant anormalement au danger terroriste. C’est pourquoi elles sont tentées de renoncer à leurs principes au nom de leur sécurité physique : la peur et le désir de sécurité deviennent des sentiments impérieux, qui l’emportent sur tout autre, à commencer par l’aspiration à l’égalité et l’attachement à la liberté.

Source : d’après Antoine Garapon (magistrat) et Michel Rosenfeld (professeur de droit), Démocraties sous stress : les défis du terrorisme global, 2016.