Doc. – Venise & Alep

traité commercial entre les deux cités
vendredi 5 juillet 2019
par  Julien Daget

Consigne : après avoir présenté le document, vous analyserez les privilèges fiscaux, juridiques et fonciers dont bénéficient les marchands vénitiens dans le Nord de la Syrie.
Méthode : l’analyse de document(s)


Anno Domini millesimo CCXX quinto, indictione XIV, mense Novembris. Cum çò fosse cosa ke misier Piero Çiani, doxe de Venezia, avese mandado lo nobel homo Thomaxino Foscarini cum sue lettere per so mesaço in l’anno sovrascripto a misier lo soldan d’Aleppo per tractar et ordenar cum luy ensembre de quelli dacii, li qual solevano pagar li Veniciani in le soe terre et de altri ordenamenti, ço è de li homeni ke morivano desordenai, e de le cose di Veniciani ò en morte, ò en vita, soè de quelle ke scampaseno de naufragio de mar in la soa terra, como ne debia esser, e de le altre cose semeiantemente, si como se trova scripto qui de sotto ; ordena in prima con ello misier lo soldan : Ke tuti li homeni de Venexia da mo inanci si siano salvi e seguri in tute le soe parte, in mar et in terra, andando e vignando in persone et in avér. Et de le mercadantie si deno pagar sex per centenero. E se alguna nave o nave plusor se rompese – la qual cosa voia Dio ke no sia – in le soe parte, le persone e l’aver loro sunt segure. Ma de quelo ke scamperà de lo mar, dè aver lo soldan quindexe per centenero. E se algun venedego morise in le sue parte, sia in podestà de ordenar tute le sue cose a qualunchano che ello vorà. E quello ke receverà habia podestate de intrometer tute le cose sença alcuna contrarietate. E se lo morise desordenado li Venedixi, ke lì serano, possa tute le cose intrometere de lo morto, e far çò, che ben li parrà. E sel morise chel no ge fuse Venedixi, lo soldan dè vardar li beni del morto, domentre che lo meso de misier lo doxe da soa parte o da parte de lo so bàilo de Acre cum le soe lettere vegnerà. E tuti li Veniciani sunt salvi et seguri alsì in vita como in morte de lo soldan. Et se algun Venitian faese robaria o maleficio sovra li homeni del soldan, li mercadanti de Venexia non deno sofrire algun danno. [...]


Année mille CCXX cinq de notre Seigneur, au mois de novembre. Comme le seigneur Pietro Ziani, doge de Venise, avait envoyé son messager accrédité, le noble Tomasino Foscarini, au seigneur sultan d’Alep, afin de traiter et décider avec lui des droits de douane que les Vénitiens avaient coutume d’acquitter sur ses terres et d’autres matières, à savoir des hommes qui meurent sans testament et des biens des Vénitiens tant vivants que morts, aussi bien des rescapés des naufrages et de ce qu’il doit en advenir et d’autres choses semblables, il arrête, en premier lieu, avec le seigneur sultan, que désormais tous les hommes de Venise sont saufs et sous la protection du sultan dans tous ses pays, sur mer et sur terre, à l’aller comme au retour, dans leurs personnes et dans leurs biens. Et sur les marchandises, on doit acquitter six pour cent. Et si un navire, ou plusieurs, s’échoue sur la côte – que Dieu veuille qu’il n’en soit pas ainsi ! – les personnes et les biens seront sous sa protection. Mais de ce qui sera sauvé du naufrage, le sultan devra avoir quinze pour cent. Et s’il advient qu’un Vénitien décède sur ses terres, qu’il ait la faculté de transmettre toutes ses affaires sans aucune opposition. Et s’il meurt sans testament, que les Vénitiens qui seront présents puissent s’entremettre dans toutes les affaires du défunt et faire ce que bon leur semblera. Et s’il meurt sans qu’aucun Vénitien ne soit présent, le sultan doit conserver les biens du défunt jusqu’à l’arrivée d’un messager muni de lettres, envoyé soit par le doge, soit par le baile d’Acre. Et s’il advient qu’un Vénitien commette un vol ou un crime aux dépens des sujets du sultan, les marchands de Venise ne devront en subir aucun tort. Ledit Tomasino demanda au sultan de lui donner un fondouk au port de Lattaquié, ainsi qu’une église et une cour. Et le sultan dit que cela n’était pas dans son pouvoir. Et ayant appris que l’émir de Lattaquié gouvernait cette terre au nom du sultan, il lui rendit visite et s’accorda avec lui pour que tous les Vénitiens soient saufs et protégés dans leurs biens et leur avoir, sur terre et sur mer, dans tout son district.

Archivio di Stato di Venezia, Pacta e aggregati, Liber Albus, f. 211 ; publié dans Gottlieb Lukas Friedrich Tafel et Georg Martin Thomas, Urkunden zur älteren Handels- und Staatsgeschichte der Republik Venedig mit besonderer Beziehung auf Bysanz und die Levante, volume 2, 1206-1255, Vienne, Kaiserlich-königlichen Hof- und Staatsdruckerei, 1856, p. 256-260. Traduit du vénitien par Jean-Louis Gaulin, Les traités commerciaux entre Venise et Alep, PUL, 2000. → https://books.openedition.org/pul/21114?lang=fr


Documents joints

Venise & Alep