Doc. : l’antisémitisme médiéval

vendredi 10 février 2017
par  Julien Daget

Consigne : en analysant les deux documents, vous montrerez comment l’Église catholique du Moyen Âge a participé au phénomène de ségrégation antisémite.
Méthode : l’analyse de document(s)


Document 1

Au nom de la sainte et indivisible Trinité. Moi, Rüdiger surnommé Huozmann, évêque des Némètes, lorsque j’entrepris de faire une ville du village de Spire, j’ai estimé accroître mille fois l’honneur du lieu en y faisant venir des Juifs. Après les avoir rassemblés, je les ai installés hors de la communauté et du lieu de résidence des autres citoyens et, afin qu’ils ne soient sans cesse dérangés par l’insolence d’une foule grégaire, je les ai entourés d’un mur. Le lieu de leur habitat, que j’avais légalement acquis – le versant en pente tout d’abord, à la suite d’un achat et d’un échange, puis la partie basse à la suite d’un don de cohéritiers – je le leur ai abandonné moyennant le versement chaque année de trois livres et demie de monnaie de Spire destinées à l’entretien de la communauté de nos frères [chanoines].
Je leur ai concédé, en outre, dans toute l’étendue de leur résidence, ainsi que dans la zone comprise entre la région au-delà du port et le port fluvial, et dans le port lui-même, la libre faculté de changer l’or et l’argent, d’acheter et de vendre ce qui leur plaît. Je leur ai aussi accordé, sur le patrimoine de l’Église, un lieu de sépulture héréditaire. J’ai enfin ajouté que, si un Juif étranger recevait l’hospitalité chez eux, il n’aurait aucun tonlieu à acquitter.
[…] Afin qu’aucun de mes successeurs ne puisse revenir sur cette donation et cette concession, qu’ils ne puissent imposer aux juifs un cens plus élevé, comme s’ils avaient usurpé cette réglementation et ne l’avaient pas reçue de l’évêque, je leur ai laissé cette charte comme preuve appropriée. Afin que le souvenir en demeure dans les siècles à venir, je l’ai corroborée en la souscrivant de ma main et l’ai fait marquer de mon sceau. Donné le jour des ides de septembre de l’an de l’Incarnation du Seigneur 1084, indiction 7, la 12e année de l’évêque susnommé.

Charte de l’évêque aux juifs de Spire, 1084, publiée dans Alfred Hilgard, Urkunden zur Geschichte der Stadt Speyer, Strasbourg, 1885. → http://sourcesmedievales.unblog.fr/  ; http://digi.ub.uni-heidelberg.de/diglit/hilgard1885


Document 2

Dans certaines provinces, les habits des juifs et des sarrasins se distinguent de ceux des chrétiens, mais que dans d’autres, un degré de confusion se produit, de sorte qu’ils ne peuvent pas être reconnus par aucune marque distinctive. Comme résultat, par erreur, des chrétiens ont des rapports sexuels avec des femmes juives ou sarrasines. De façon que le crime d’un tel mélange maudit ne puisse plus avoir d’excuse dans le futur, nous décidons que les juifs et les sarrasins des deux sexes, dans toutes les terres chrétiennes, se distinguent eux-mêmes publiquement des autres peuples par leurs habits. Conformément au témoignage des Écritures, un tel précepte avait déjà été donné par Moïse (Lévitique 19 ; Deutéronome 22).
Les jours de lamentation et le dimanche de la Passion, les juifs devront s’abstenir de paraître en public ; certains d’entre eux, en effet, nous l’avons appris, osent en de tels jours arborer leurs plus beaux habits, et se moquent des chrétiens qui portent des signes de deuil en mémoire de la très sainte Passion.
[…] Il serait absurde de laisser les blasphémateurs du Christ exercer quelque pouvoir sur des chrétiens.

Concile de Latran IV, 1215, canons 68 et 69.


Documents joints

L'Église et les juifs