Doc. : 2015, Obama en Afrique
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Consigne : à travers votre analyse des documents, vous montrerez comment la venue et le discours d’Obama ont été reçus en Afrique.
• Méthode : l’analyse de doc(s)
Barack Obama a donné mardi le premier discours d’un président américain au siège de l’Union africaine, au terme d’un voyage de deux jours en Éthiopie. À cette occasion, il a réitéré les messages clés de ses allocutions au Kenya et en Éthiopie, en invitant les présidents africains à ne pas s’accrocher au pouvoir.
D’entrée de jeu, Barack Obama s’est montré « reconnaissant » de pouvoir enfin s’adresser devant les représentants d’un milliard de personnes sur le continent, au siège de l’Union africaine à Addis-Abeba, mardi 28 juillet. Une première pour un président américain en fonction.
Le premier président noir des États-Unis a parlé en tant que « fier Américain » mais surtout en tant que « fils d’un Africain », a-t-dit en faisant clairement référence à ses origines kényanes.
Sans grande surprise, les thèmes de la démocratie, du terrorisme, de la corruption et des droits des femmes se sont retrouvés au cœur de son discours.Condamner les coups d’État
Barack Obama a profité de cette tribune pour tacler les présidents africains qui s’accrochent au pouvoir, en enchaînant les déclarations provocatrices mais toujours avec une touche d’humour.
« Les progrès démocratiques en Afrique sont en danger quand des dirigeants refusent de se retirer une fois leur mandat terminé. Laissez moi être honnête avec vous. Je comprends ! Je suis privilégié de servir comme président. J’adore mon travail mais notre Constitution ne me permet pas de me présenter à nouveau. Je pense que je suis un bon président ! Si je me représentais, je pense même que je pourrais gagner ! Mais je ne peux pas… Personne n’est au dessus de la loi, même le président. Je vais être honnête avec vous, j’ai une vie après la présidence ! », a-t-il lancé sous les rires et les applaudissements nourris de la salle, en ajoutant qu’il serait alors plus disponible pour visiter l’Afrique plus souvent.
Barack Obama a appelé l’Union africaine à condamner vivement les coups d’État et à faire en sorte que les dirigeants respectent le nombre maximal de mandats déterminés par la Constitution de leur pays.
« Lorsqu’un dirigeant essaie de changer les règles au milieu de la partie pour rester en poste, il s’expose à l’instabilité et à la discorde, comme nous l’avons vu au Burundi« , a-t-il dénoncé en faisant référence au troisième mandat contesté du président Pierre Nkurunziza.
« La démocratie n’est pas seulement la tenue d’élections. Quand des journalistes sont emprisonnés parce qu’ils ont fait leur travail ou des activistes parce qu’ils ont défendu leurs idées, vous avez peut-être une démocratie sur le papier mais pas en substance », a-t-il ajouté sur un ton ferme, tout en reconnaissant que même la démocratie américaine n’était « pas parfaite ».Terrorisme : nouveau partenariat
Pour combattre le terrorisme, les États-Unis « soutiennent l’Afrique » et sont prêts à intensifier leur coopération dans ce domaine, a assuré le président américain.
Le président américain a souligné les victoires de la mission de l’Union africaine (Amisom), entraîné par les Américains, contre les Shebab. Il a aussi salué le travail de la force régionale menée par l’Ouganda en Centrafrique contre l’Armée de Résistance du Seigneur (LRA). Au sujet du groupe terroriste nigérian Boko Haram et des Shebab dans la Corne de l’Afrique, le président américain a été sans équivoque : « Nous devons dire ce qu’ils sont : des tueurs ». Et de saluer au passage le travail de la force régionale menée par le Tchad.
« La bonne gouvernance est la meilleure arme contre le terrorisme », a-t-il poursuivi en soulignant le travail de son homologue nigérian, Muhammadu Buhari, reçu à la Maison Blanche le 20 juillet dernier.Éradiquer le « cancer de la corruption »
Afin de permettre un meilleur développement du continent, Barack Obama a également appelé l’Afrique à éradiquer le « cancer de la corruption ».
« En Afrique la corruption fait perdre des milliards de dollars aux économies des pays, de l’argent qui pourrait être utilisé pour créer des emplois, construire des hôpitaux et des écoles », a-t-il martelé.Droits des femmes
Enfin, il a conclu son discours en martelant l’importance d’offrir aux filles la même éducation que les garçons. « La tradition parfois nous fait reculer. La mutilation des corps des petites filles et leur mariage à 10 ou 11 ans, cela doit se terminer », a dit le président américain.
« Au football, on ne peut pas laisser la moitié de l’équipe de côté », a-t-il illustré en réaffirmant l’importance de « mettre un terme à la violence conjugale et au viol comme arme de guerre ».
Une heure après la fin de son discours, Barack Obama a quitté l’Éthiopie, mettant fin à sa deuxième mini-tournée africaine qui aura duré quatre jours.
« Les points clés du discours de Barack Obama au siège de l’Union africaine », Jeune Afrique, 28 juillet 2015. http://www.jeuneafrique.com/251355/politique/barack-obama-ethiopie-points-cles-de-discours-historique-siege-de-lunion-africaine/
Nous n’avons pas aimé le ton de donneur de leçons de Barack Obama
Quelle a été votre réaction en écoutant le discours de Barack Obama ?
Nous entendons toujours ce genre de discours de la part des leaders occidentaux, qui vivent dans le passé et qui nous prennent pour des enfants. D’un point de vue intellectuel, nous sommes assez dubitatifs. Nous trouvons discutable cette mauvaise habitude de nous donner des leçons. Faut-il rappeler à Barack Obama que le président Roosevelt a été élu quatre fois d’affilée en 1933 ? Il ne doit pas nous faire la leçon.Vous êtes-vous sentis concernés par cette salve du président américain ?
Pas du tout ! Pourquoi nous serions-nous sentis concernés ? Le président Kabila n’a jamais dit qu’il voulait modifier la Constitution. Il n’existe que le discours de l’opposition en RD Congo qui va dans ce sens là. Nous n’avons pas aimé le ton de donneur de leçons de Barack Obama. D’autant que nous savons que les présidents qui ont conservé le plus longtemps le pouvoir en Afrique, comme Mobutu en RD Congo, l’ont fait grâce au soutien des Américains.
Lambert Mendé (porte-parole du gouvernement de la République démocratique du Congo et ministre de la Communication), interrogé par Sabrina Myre, « Nous n’avons pas aimé le ton de donneur de leçons de Barack Obama », Jeune Afrique, 29 juillet 2015.
Être donneur de leçon, c’est bien, mais nous pensons que l’Afrique doit prendre son destin entre ses mains et le Congo a cette chance d’avoir un homme d’exception qui nous réunit autour du dialogue pour régler les problèmes à l’africaine. Pour ce qui est du Congo nous avons eu un dialogue avec toutes les forces vives de la nation et nous pensons que la démocratie est universelle, mais elle doit s’adapter aux us et coutumes. C’est bien qu’il pense à la fin de son mandat à l’Afrique, mais l’Afrique n’attend pas grand chose de ses enfants qui sont nés à l’extérieur et qui ne connaissent pas forcément la réalité africaine.
Jean-Didier Elongo, membre du comité central du PCT (le Parti congolais du travail, de Denis Sassou-Nguesso, au pouvoir en République du Congo depuis 1997).
Attention à Obama, le dragueur
A défaut de séduire le monde par le niveau de vie de ses populations, le niveau de formation de ses jeunes, l’intégrité de ses cadres ou par la beauté de ses villes, l’Afrique est partie pour drainer le monde à ses pieds, avec ses deux atouts-maîtres : son potentiel démographique et ses ressources naturelles, largement inexploitées. Ce sont effet, ces deux aspects qui fondent le discours optimiste tenu le samedi dernier à Naïrobi par Barack Obama. Si l’Afrique est envisagée comme la future locomotive de la croissance mondiale, c’est parce que d’une part, elle jouit de grandes potentialités sur le plan des ressources naturelles et de l’autre, elle offre de belles perspectives, comme débouché.
Devant les participants au sommet mondial de l’entrepreneuriat, le président américain a endossé le costume du coach soucieux de rassurer son auditoire. En lieu et place de l’Afrique misérabiliste, il a dressé un portrait du continent plus rayonnant. Se voulant positif, il a noté la croissance du continent africain, le recul de la pauvreté, l’accroissement de la classe moyenne et le goût de la jeunesse africaine pour les technologies. Naturellement, il n’a pas tord. Ce portrait là du continent existe bel et bien. Mais il faudrait bien se demander si un discours aussi lénifiant ne s’inscrit pas dans la logique de la séduction du continent par Barack Obama. Le président américain n’était-il pas notamment dans une posture bien assumée ?
Parce que si depuis quelques années, le continent-berceau de l’humanité fait l’objet d’une attention aussi planétaire, ce n’est certainement pas pour ses beaux yeux. Il en découle que la compassion et l’intérêt qu’on lui manifeste ça et là ne sont que feints. Il s’agit d’un cinéma qui s’inscrit dans la logique de la rivalité que se livrent les grands du monde, dans l’optique d’une certaine réoccupation du continent. On s’est rendu compte que l’Afrique est la partie du monde qui garde encore relativement vierges ses immenses richesses. De même, les experts ont fini par réaliser que la croissance démocratique dont on se moquait il y a quelques années, n’est pas qu’un handicap. Au contraire, avec environ un milliard d’habitants à l’horizon 2050, l’Afrique est perçue comme un marché géant en perspective. Pour ces deux raisons fondamentales, tout le monde lui fait les yeux doux en vue de conquérir son cœur.
Boubacar Sanso Barry, Ledjely.com (site d’information guinéen), 27 juillet 2015. http://www.ledjely.com/2015/07/27/kenya-attention-a-obama-le-dragueur/