Doc. : le front de l’Est, une guerre d’anéantissement
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Consigne : en analysant le document, vous montrerez les particularités des combats en Europe de l’Est et comment cette guerre a été justifiée côté allemand.
• Méthode : l’étude critique
Ordre du jour de la 11e armée, le 20 novembre 1941
Depuis le 22 juin, le peuple allemand livre un combat à la vie à la mort contre le système bolchevique.
Ce combat n’est pas mené contre les forces armées soviétiques selon des méthodes conventionnelles guidées par les seules règles de la guerre européenne.
Derrière le front aussi, le combat se poursuit. Des francs-tireurs partisans en tenue civile attaquent les soldats isolés et les détachements, cherchant à perturber notre ravitaillement par le sabotage avec des mines et des machines explosives. Les Bolcheviques laissés derrière maintiennent la population libérée dans un état d’agitation par la terreur et tentent de saboter la pacification politique et économique du territoire. Les récoltes et les usines sont détruites et la population urbaine en particulier est livrée impitoyablement à la famine.
Les Juifs servent d’intermédiaires entre l’ennemi sur nos arrières et les restes de l’Armée rouge et l’État-Major rouge qui se battent encore. Ils contrôlent davantage qu’en Europe toutes les positions clés de la direction politique, de l’administration, du commerce et des affaires, et continuent de former la cellule de tous les troubles et soulèvements possibles.
Le système judéo-bolchevique doit être éradiqué [1] une fois pour toutes. Puisse-t-il ne plus jamais intervenir dans notre espace vital européen.
Le soldat allemand n’est donc pas seulement chargé de détruire les instruments militaires de la puissance de ce système. Il est aussi porteur d’un concept racial et le vengeur de toutes les atrocités commises contre lui et contre le peuple allemand.
[…] Le soldat doit comprendre la nécessité de conduire de sévères châtiments infligés aux Juifs, qui sont les forces intellectuelles derrière la terreur bolchevique. Ces mesures sont aussi nécessaires pour étouffer dans l’œuf les soulèvements, dont les Juifs sont les principaux instigateurs. […]La situation alimentaire de l’Allemagne exige que les troupes soient ravitaillées sur le territoire ennemi, et qu’elles mettent à la disposition de la patrie le plus vaste stock de ravitaillement qu’elles pourront. Dans les villes ennemies, une grande partie de la population devra avoir faim. Aucun témoignage erroné d’humanité ne devra être donné aux prisonniers de guerre ni à la population, à moins qu’ils ne soient au service de l’Armée allemande. […]
Document signé par le général Erich von Manstein [2], commandant de la 11e armée allemande, en date du 20 novembre 1941. Plusieurs autres commandants d’armée ont fait diffuser de semblables ordres au même moment, sur instruction du chef du groupe d’armées Sud, le maréchal Walter von Reichenau.
Le document fut utilisé pendant l’interrogatoire du maréchal von Manstein à l’occasion du procès de Nuremberg le 10 août 1946 (document 4064-PS USA-927).
→ International Military Trials, Nazi Conspiracy and Aggression : Supplement A : Documents Introduced in Evidence By British and American Prosecutors, Washington, US Government Printing Office, 1947, p. 826-828.
[1] L’expression allemande ausgerottet werden se traduirait par « doit être éradiqué », plutôt que par « exterminé ».
[2] Erich von Manstein est né en 1887 dans une famille de la noblesse militaire prussienne. Il sert comme officier dans l’Armée allemande pendant les deux guerres mondiales : il se fait remarquer comme officier d’état-major puis comme commandant. Jugé en 1949 à Hambourg par un tribunal britannique et condamné à 18 ans de prison pour crime de guerre, il est libéré pour raisons médicales en 1953. Il devint ensuite conseiller auprès des armées allemande et étasunienne. Il est mort en 1973. Cf. Benoît Lemay, « Le feld-maréchal Erich von Manstein ou le virtuose de la stratégie au service du diable : un allié ou une victime de l’entreprise hitlérienne d’agression et de destruction en Europe ? », Bulletin d’histoire politique, volume 16, numéro 1, automne 2007, p. 197.